Sexisme : état des lieux en France à l’heure de la polarisation
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Publié le 23/01/2025
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), dans son rapport annuel sur l’état du sexisme en France, publié ce lundi 20 janvier, souligne deux tendances inquiétantes : une polarisation croissante autour des questions d'égalité de genre dans les médias et les discours politiques, et des inégalités sociales et économiques persistantes.
« Les femmes sont plus féministes, et les hommes plus masculinistes, surtout les jeunes. Les Français attendent que les responsables politiques agissent contre le sexisme, notamment en instaurant enfin les cours à l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, qu’ils plébiscitent largement. » a résumé Bérangère Couillard, présidente du Haut Conseil à l’Égalité.
6 Français sur 10 estiment qu’il est difficile d’être une femme
C’est le cas de 86 % des femmes de 25 à 34 ans et de 66 % des jeunes hommes, selon un baromètre réalisé en octobre 2024 auprès d’un échantillon représentatif de 3 200 Français de 15 ans et plus.
Un sentiment accru chez les jeunes : 94 % de femmes de 15 à 24 ans qui estiment qu’il est plus difficile d’être une femme aujourd’hui, une progression très importante de 14 points par rapport à l’an dernier.
Les inégalités de traitement entre les hommes et les femmes sont citées dans le monde du travail (76 %), dans la rue et les transports (71 %), dans le monde politique (70 %), dans la vie de famille (62 %), dans les médias (48 %).
Le baromètre montre que les femmes sont confrontées au quotidien au sexisme : 86 % d’entre elles ont déjà vécu une situation sexiste et 9 sur 10 ont adopté des stratégies d’évitement du sexisme au quotidien.
Des inégalités économiques toujours aussi importantes
En arrivant sur le marché du travail, femmes et hommes n’occupent pas les mêmes métiers. D'après le HCE, plus de 80 % de l’emploi serait « non-mixte » c'est à dire occupé par plus de 60 % de l’un des deux sexes.
C’est ainsi que les femmes connaissent un espace d’évolution professionnelle plus restreint, entre « plafond de verre », « parois de verre » et « plancher collant ».
Plafond de verre : 22 % de femmes parmi les salarié.es les mieux rémunéré.es (ségrégation verticale)
Parois de verre : 44 métiers à prédominance masculine pour 23 métiers à prédominance féminine (ségrégation horizontale)
Plancher collant : 55 % des emplois à bas salaire sont occupés par des femmes (alors qu’elles ne sont que 41,5 % des ETP du secteur privé)
Selon les dernières données Insee, le revenu salarial moyen des femmes est inférieur de 23,5 % à celui des hommes dans le secteur privé.
Et les hommes ?
73 % des hommes en général trouvent qu’on généralise en considérant que tous les hommes sont sexistes (+ 3 points).
En parallèle, 45 % des hommes de moins de 35 ans - et un quart des Français - jugent qu’il est difficile d’être un homme, une idée qui progresse chez les jeunes hommes, selon le baromètre.
Le mouvement #MeToo et le « backlash » antiféministe qui suit cette vague depuis quelques années, documenté dans le rapport 2023 sur l’état du sexisme en France du HCE, ont participé à renforcer cette dernière tendance jusqu’à clairement cliver parmi les plus jeunes générations.
En outre, 13% des hommes pensent qu’il est plus difficile d’être un homme qu’une femme.
Des attentes fortes face à des actions jugées insuffisantes contre le sexisme
La prévention et la lutte contre le sexisme sont considérées comme des sujets importants pour plus de 3 Français sur 4 (77 %), autant par les femmes (80 %) que par les hommes (72 %). Il devrait même s’agir de sujets prioritaires pour les pouvoirs publics (84 %).
Le regard porté sur l’action des pouvoirs publics est critique : moins d’un tiers des Français (et un quart des femmes) estiment qu’ils font ce qu’il faut pour lutter contre le sexisme.
Le procès des viols de Mazan ensuite a aidé à une « prise de conscience », selon le HCE. Pour 65 % des Français, cette affaire illustre le fait que « tous les hommes portent une part de responsabilité » en matière de violences sexistes et sexuelles.
De plus, environ 9 Français sur 10 « considèrent que les hommes ont un rôle à jouer dans la prévention et la lutte contre le sexisme ».
Face à ces résultats, le HCE a fait le choix d’établir un suivi des recommandations déjà formulées dans les précédents rapports sur l’état du sexisme en France.
Le Haut Conseil à l’Égalité préconise des solutions plébiscitées par les Français
L’éducation à l’égalité est jugée prioritaire par la quasi-totalité des Français. 9 Français sur 10 soutiennent l’instauration de cours à l’éducation à la vie affective et sexuelle. Cette mesure est même perçue comme la plus efficace contre le sexisme pour 10 Français sur 10.
- Le HCE préconise enfin de développer des « budgets sensibles au genre ».
L’objectif de ces enveloppes serait de permettre l’analyse, tant au niveau national, que régional ou communal, ce qui est dépensé pour les garçons et les hommes d’une part, pour les filles et les femmes d’autre part.
Une action résolue pour une plus grande mixité et parité dans le monde professionnel. Dans la formation de nos jeunes d’abord et dans le monde du travail ensuite.
Des pouvoirs publics qui doivent passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultats, notamment avec la mise en place de budgets sensibles au genre et l’adoption de critères d’égaconditionnalité dans l’ensemble des aides et financements publics.
La réforme du congé paternité-parental est une attente forte en matière de justice sociale et d’égalité, plébiscitée par 7 Français du 10.
Un engagement plus important des hommes dans la lutte contre le sexisme : 8 Français sur 10 trouvent qu’il existe une tolérance trop importante vis-à-vis des actes et propos sexistes.
En savoir plus : lire le rapport 2025 « État des lieux du sexisme en France à l’heure de la polarisation »
Qu’est-ce que le sexisme ? Le sexisme est une idéologie qui repose sur le postulat de l’infériorité des femmes par rapport aux hommes, d’une part, et d’autre part, est un ensemble de manifestations : gestes, propos, pratiques et comportements, des plus anodins en apparence (remarques…) aux plus graves (coups, viols, meurtres…). Ces manifestations ont pour objet de délégitimer, stigmatiser, humilier ou violenter les femmes et ont des effets sur elles (estime de soi, santé psychique et physique et modification des comportements).